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  • Writer's pictureVacances à Moriani

Contes et Légendes Corses (1)

En hiver, les paysans rentrent tôt au village car les jours sont courts et la nuit tombe vite. Les outils sont remisés, la charrue abandonnée dans le champ et les bêtes sont mises à l’abri. Il ne faut pas s’attarder en chemin car on a peur de ces ténèbres qui sont l’univers des mazzeri (sorciers), des steghe (sorcières), des murtulaghji (revenants), des diavuli (diables) et autres démons.

On se hâte de rentrer au logis pour préparer la veillée qui rassemblera tout le monde autour du fucone ... Après avoir soupé, on se rend dans la maison d’un voisin, d’un parent ou d’un ami pour se joindre à la veillée (veghja) que chacun organise tour à tour. Alors, dans cette atmosphère, au creux de la nuit noire, les histoires se content et s'écoutent.


C'era una volta… (1) Il était une fois


La Fée d’Ulmeto

Il était une fois un berger nommé Ghjuvanni qui vivait dans une maisonnette non loin d’Ulmetu, près de Propriano. Ce berger était accablé de soucis à cause de la sécheresse : il ne pleuvait plus depuis plusieurs mois, l’herbe de la plaine était devenue paille sèche et ses animaux s’affaiblissaient… Ghjuvanni, devait emmener ses brebis de plus en plus loin afin de les faire manger.

Un matin, alors qu’il se trouve près du petit fleuve presque à sec, le Bàraci, il remarque que celui-ci a disparu sous une boue chaude, épaisse et qui fume… Curieux, le berger s’avance et remarque, au milieu de la vase, une femme âgée qui paraît embêtée… Enlevant ses gros souliers cloutés, Ghjuvanni crie :

« Attendez, je viens vous porter secours… » Et le berger s’élance dans l’eau étonnamment chaude. Ghjuvanni s’approche de la vieille femme restée muette jusque-là…

« Voilà, nous y sommes… Prenez ma main et serrez fort…

Je me nomme Demoiselle et te remercie de ta bonté, cher Ghjuvanni… »

Le berger, de plus en plus étonné, ne peut alors se retenir…

« Mais… Comment connaissez-vous mon nom et que faites-vous ici ?

J’ai fait un long voyage pour te voir… Laisse-moi reprendre mon souffle et je t’expliquerai tout… »

Sortis de la boue, Ghjuvanni et Demoiselle se lâchent les mains. La vieille dame se transforme alors en une superbe jeune fille… Avec ses grands yeux bleus, ses cheveux noirs et son vêtement brodé d’or, Demoiselle porte bien son nom…

« N’aie pas peur Ghjuvanni, dit Demoiselle… Je suis une fée et j'ai voulu tester ta compassion. Tu es courageux, tu es venu à mon secours… Tu auras donc une belle récompense… »

De son doigt tendu, Demoiselle pointe l’eau et la fange qui tremblotent et fument…

«Voici une source d’eau chaude qui fera du bien aux animaux comme aux hommes. Aux animaux, elle donnera une herbe savoureuse et riche en fleurs de toutes sortes. Aux hommes, elle offrira la possibilité de soigner diverses affections comme les maladies des poumons ou de la peau. Cette eau est un grand cadeau pour toi, pour tes enfants et les enfants de tes enfants… Fais attention à bien la conserver, propre et toujours saine… Un jour, elle représentera votre grande richesse… Garde le secret et ne dis rien à personne.»

Le berger promet de garder le secret, fait ses adieux à la bonne fée qui disparaît subitement… Il s'en retourne vers sa maisonnette avec ses brebis. Le lendemain, l’herbe promise, verte et drue, couvrait les alentours et le berger, content, riait.


C’est ainsi qu’aujourd’hui, en plus de ses paysages magnifiques, de ses plages et de son huile d’olive renommée, Ulmetu offre à tous, résidents locaux et visiteurs de passage, sa grande richesse naturelle : l’eau thermale de Bàraci, cadeau d’une fée et source de bien-être. Un véritable enchantement pour ceux qui savent en profiter…"


La légende du taureau blanc

C’est l’histoire du retour miraculeux, sur la plage d'Ajaccio, d'un jeune homme, nommé Ghjuvanni , après 20 ans d’esclavage en Afrique du Nord.

Ses premières paroles en arrivant en Corse sont : «E Cristu chi m'a savatu » (le Christ m'a sauvé). Ghjuvanni décide d'ériger un temple au Christ, son sauveur.

Les anciens, selon la coutume décident pour trouver un emplacement au sanctuaire de lâcher un taureau blanc dans le maquis, et de choisir l'endroit où il s'arrêtera.

Le taureau libéré galope dans la montagne et, soudainement, s'arrête net sur les ruines d'un ancien temple païen. Les anciens sont convaincus : il faut bâtir un temple pour le Dieu nouveau que Ghjuvanni appelle Cristus et abandonner les cultes antiques...

C'est ainsi qu'aurait été, selon cette seconde légende, bâtie la chapelle de SAN LUNARDU et christianisé le CELAVU.



U FRATE È A SORA


Un moine avait jadis séduit et enlevé une religieuse.

Ils s'enfuyaient tous deux vers Propriano, lorsque juste avant

de franchir le fleuve Rizzaneze, Dieu les pétrifia.

Ce sont les menhirs dits U Frate è a Sora.

(Le moine et la religieuse)

Le plus grand est l'homme, l'autre est la femme.



La légende de la Calcagnetta.

Il y a très longtemps, la mer en furie porta vers les côtes de Padulella, trois barques à voiles blanches. Un berger qui gardait son troupeau près de là, s'approcha et après une longue attente, aperçut à l'intérieur des embarcations des bestioles ayant la forme de grosses fourmis blanches et rouges de la taille d'un cabri.

La nouvelle s'étant propagée dans les hameaux de la vallée du Murianincu, les hommes de Reghjetu, Cioti, Serra, Serrale, Tribbiolu, Piazze, Coccula se précipitèrent vers l’endroit indiqué par le berger. Mais les barques avaient disparu.

Ils cherchèrent longtemps et trouvèrent enfin, éparpillées près de l’embouchure du Buccatoghju, les grosses fourmis recherchées.

Ils s’aperçurent qu’elles avaient un visage humain et qu’elles étaient gardées par trois hommes noirs armés jusqu’aux dents, à qui les hommes du Murianincu offrirent du fromage et du lait.

Un pacte fut conclu entre les deux groupes. Les jeunes pouvaient épouser les naines exceptée la plus belle,« Bellafiora », qui était leur reine.

Ainsi furent célébrés ces mariages et ce ne furent que chants, bals et musiques jusqu’au jour où un jeune homme de Coccula accompagné de son père, éperdument amoureux de « Bellafiora » l’enleva en la ligotant sur un cheval.

Arrivé en un lieu appelé « Malanotte » (nuit maudite) et avant de franchir la rivière, le cheval trébucha et se noya dans un trou d’eau en même temps que « Bellafiora » qui eut le temps de crier avant de sombrer : « qu’ils soient maudits ! »

Aussitôt, un brouillard épais couvrit les pentes de la pieve de Moriani et quand le jour se leva, la malédiction commença.

Le jeune homme entreprenant et son père expirèrent, pris d’un mal foudroyant qui les atteignit au talon.

Le même mal toucha tous les hommes et les hommes seuls, terrassés par cette maladie qui, parce qu’elle naissait dans le talon, fut appelée « A Calcagnetta ».

On vit alors des maisons vides, des hommes errants, des cadavres dévorés par les corbeaux. Les malades péniblement se traînèrent jusqu’à la pointe qui domine la vallée où se trouve aujourd’hui la chapelle de San Mamilianu, ainsi que sur la place où était creusée une fosse commune: « l’arca ». Ils attendaient la mort. Quand d’autres malades arrivaient, ils poussaient les moribonds dans la fosse et prenaient leur place. Et ainsi de suite…

C'est ainsi que disparurent tous les hommes du Murianincu, ces géants taillés pour le travail et la guerre.

Récemment en voulant égaliser la place devant la chapelle, la municipalité de San Ghjuvanni fit creuser une tranchée pour construire un mur.

Qu’elle ne fut pas sa surprise de découvrir une succession de fosses bourrées de crânes et de divers ossements humains.

Un anthropologue de la région de Bastia, en mesurant les tibias, en conclut que les squelettes appartenaient à des hommes mesurant entre 1.72 et 1.78m, soit des géants pour cette époque.



Les calanches de piana

Satan, l’ange déchu, tomba follement amoureux d’une bergère. Il l’observa des semaines du fond de l’enfer, s’en éprenant chaque jour davantage.

Un beau matin, il se présenta sur terre et entreprit la conquête de la belle. Et voilà qu’au lieu de céder au Prince des Ténèbres, la jeune femme l’insulta, le frappa et appela son mari. Ce dernier, saisi de rage administra une raclée au pauvre diable qui dut s’enfuir la queue entre les jambes.

Le Diable ne chercha même pas à tuer le mari et la femme... Il décida plutôt de rendre l’endroit invivable : Il tapa, fendit, brisa et renversa la roche, pour rendre l'endroit abrupte, escarpé, tourmenté...

Saint-Martin passa par là et décida de bénir les falaises.

En constatant qu’il n’arrivait pas à en chasser la fureur, il appela une vague qui caressa le rocher. Ainsi naquit le Golfe de Porto…


Pazienza

Il était une fois un père et une mère qui avaient une fille très belle. Ils travaillaient en plantant des oignons dans leur jardin.

Le fils du roi, qui passait par là, remarqua la jeune fille. Elle était si belle qu'il la voulut pour épouse.

Ses parents, bien qu'honorés de cette demande, ne voulaient pas se séparer de leur fille.

Mais le fils du roi insista et le mariage fut donc célébré.


Un an plus tard, la jeune femme mit au monde une fille et le roi lui dit :

Embrasse-la car je vais la donner en nourrice et tu ne la verras plus .

Ainsi fût fait, malgré l'énorme peine de la jeune mère.

Un an ou deux après un garçon naquit et ce fut la même chose.

Elle se contentait de l'embrasser, le cœur gros de ne pas pouvoir garder son enfant, et ne disait toujours rien. Elle faisait tout ce que disait son mari.


Un jour, après 17 ans d'union, le roi lui dit : Je connais une fille très belle et je voudrais l'épouser... Comme tu es vieille maintenant, tu vas t'en aller et rentrer chez tes parents.

Elle partit le cœur gros et s'en retourna chez ses parents, qui ne comprirent pas mais furent très heureux de la revoir.

Puis le roi fit annoncer partout qu'il allait se remarier. Quelques temps plus tard, il envoya chercher sa première femme pour que ce soit elle qui prépare le festin.

Ce fut un affront pour elle, mais elle était obéissante, et s'exécuta quand même.

Alors qu'elle était dans la cuisine en train de travailler et que les autres faisaient la fête, un serviteur est venu lui dire :

Le roi vous demande, il veut vous parler, venez immédiatement, telle que vous êtes !


Entrée dans la salle du festin, le roi lui dit :

Regardes cette jeune femme, n'est-elle pas très belle ?

Oh oui, mon roi, elle est belle, très belle ! On dirait une fleur

Regarde bien, car celle-là, c'est ta fille et celui-là c'est son frère, ton fils.

J'ai voulu voir jusqu'où irait ta patience...

Je t'ai enlevé tes enfants et tu n'as rien dit!

je t'ai renvoyée chez toi et tu n'as rien dit!

je t'ai mise à la cuisine pour faire la servante et tu n'as rien dit!

Une patience si grande, personne n'aurait pu l'avoir!

Alors, maintenant, nous allons vivre ensemble, ta place est ici avec ton mari et tes enfants.

Et moi je n'ai jamais voulu d'autre femme que toi.


Ils ont fait venir le jour même son père et sa mère et ils ont vécu heureux tous ensemble.


La légende des 7 moulins.

Pendant les guerres Corses, vivait près d’Ajaccio une famille très fortunée qui avait une fille nommée Ginébra. Le meunier du village avait quant à lui le plus beau garçon du pays nommé Théobald. Ginébra, avait 20 ans quand elle rencontra Théobald et en tomba éperdument amoureuse. Elle voulait l'épouser mais son père ne l'entendait pas de cette oreille. Cependant, il adorait sa fille : Il fit donc venir Théobald et lui promit sa fille à condition qu'il fasse fortune.

Le jeune-homme quitta Ajaccio et s'en retourna au moulin de ses parents. L'orage le prit en chemin. Au détour d'un sentier du maquis il vit un riche négociant vénitien qui s'avançait vers lui. C'était Satan chassant les âmes... Il lui proposa un pacte et Théobald vendit son âme contre la fortune qui lui permettrait d'épouser sa dulcinée. Six moulins s'élevèrent à côté du moulin paternel et Théobald amassa rapidement une grande fortune. Ginébra compris très vite que les 7 moulins n'étaient pas étrangers à cette fortune et elle soutira a son mari le secret de cette acquisition soudaine. Théobald lui avoua qu'il avait obtenu de Satan six moulins qui répondraient tous ses souhaits. La cupide Ginésia s'empressa de faire ses voeux : Au premier moulin elle demanda des tonnes de blé, au second un tas d'or, au troisième une fontaine de diamants, au quatrième un somptueux banquet au cinquième une troupe de musiciens. Pétrie de vénalité elle en oublia son amour pour Théobald et prit pour amant un de ses jeunes serviteurs. Un jour elle demanda à son époux de l’ accompagner au sixième moulin. Arrivée sur place Ginébra se pencha en avant et par mégarde fit tomber un médaillon contenant le portrait de son amant. Théobald reconnaissant le serviteur, fût pris d'une folie désespérée et jeta la jeune femme sous la meule de pierre avant d'être lui-même happé par la trémie. Dès lors, dans le maquis ce fût le grand silence... Suivi, soudain, d'un hurlement d'horreur qui glaça le sang des villageois.

Les 7 moulins disparurent dans un incendie infernal... Et en lieu et place une statue de la Vierge apparu. Elle se trouve à présent dans l'oratoire de Lorétu à Ajaccio.




 

A suivre....


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